Les domaines et terres agricoles résultent bien souvent du travail de toute une vie, voire de plusieurs générations. La valeur de ces biens est bien souvent importante, notamment dans notre région ou les conditions d'ensoleillement sont exceptionnelles.
Outre les aspects psychologiques, familiaux ou patrimoniaux, la fiscalité a longtemps constitué un frein au transfert, de par l'importance des droits de mutation exigés, et de par l'importance de la taxation des plus-values.
Le législateur a bien compris que la fiscalité ne devait pas être un frein à la transmission. La continuation de l'entreprise sert l'intérêt de tous. En effet, non seulement elle pérennise les emplois, mais elle assure aussi le maintien de recettes fiscales. Un certain nombre de mesures ont donc été adoptées au fil du temps, pour favoriser les donations d'entreprise.
La législation est complexe et en perpétuelle évolution. Si le désir de transmettre votre exploitation existe, il convient donc d'être bien accompagné.
Un certain nombre de moyens pour réduire le montant des plus-values et celui des droits de mutation existent. Cependant, pour pouvoir bénéficier de certaines dispositions fiscales, il convient de s'y prendre suffisamment tôt...
Au niveau des plus-values :
La donation d'une exploitation agricole individuelle est assimilée fiscalement à une cession.
Elle entraine donc la constatation de plus et moins-values sur l'ensemble des éléments de l'actif immobilisé et du fonds agricole, y compris les terres (si l'option pour le maintien dans le patrimoine privé n'a pas été faite). La plus-value correspond à la différence entre la valeur réelle des éléments transmis et leur valeur comptable résiduelle.
On distingue deux types de plus-values :
Les plus values à court terme, taxées comme le bénéfice de l'exploitation au barème progressif de l'impôt sur le revenu (cas de la majorité des biens transmis).
Les plus values à long terme, taxées à 16% augmentés des15.5% de prélèvements sociaux (essentiellement relatives aux terres et aux immeubles).
Si les biens ont pris de la valeur, les impôts à payer peuvent s'élever à des sommes très conséquentes
Il faut savoir que plusieurs possibilités d'exonérations sur les plus values existent :
-Exonération en fonction de la valeur du fonds (code général des impôts (CGI) art 238 quindecies) : elle s'applique lorsque l'ensemble des éléments transmis n'excède pas 300 000€ (exonération totale si la valeur est inférieure à 300 000€, et exonération partielle dégressive si la valeur des éléments transmis est comprise entre 300 000€ et 500 000€)
-L'exonération des plus values dans le cadre d'un départ à la retraite (CGI art 151 septies A) sous certaines conditions. Attention, la solution est non applicable dans le cas d'une donation car cette exonération ne s'applique qu'aux mutations à titre onéreux.
-Exonération 151 septies B, abattement pour durée de détention des biens immobiliers affectés à l'exploitation.
-Exonération petites entreprises (CGI art 151 septies) : elle est accordée en fonction du montant total des recettes. L'exonération est totale en cas de moyenne sur deux ans inférieure à 250 000€. L'exonération est partielle et dégressive lorsque la moyenne des recettes se situe entre 250 000€ et 350 000€.
De nombreuses conditions sont à remplir pour bénéficier de ces exonérations, nous ne pouvons pas toutes les citer, mais il est dans tous les cas essentiel d'avoir exercé l'activité depuis au moins 5 ans lors de la transmission.
Néanmoins, sachez que s'il n'y a pas de possibilité d'exonération, il est peut être possible de bénéficier d'un report d'imposition.
En effet, il existe quelques possibilités de « report d'imposition » :
Le mécanisme du report de taxation a pour principe de retarder la logique de taxation des plus-values, en cas de transmission à titre gratuit.
Attention, ce report sera remis en cause en cas de cessation d'activité, de cession, ou de mise en location gérance. La taxation des plus-values deviendra alors immédiatement exigible.
Le bénéfice du report ne sera en revanche pas remis en cause en cas de nouvelle transmission ou restructuration pouvant elle-même bénéficier d'un report.
Nous pouvons citer deux types de reports principaux :
-report d'imposition dans le cadre de la donation d'une exploitation individuelle (CGI art 41) , pouvant se transformer en exonération totale si l'activité est poursuivie par le donataire au moins 5 ans.
-report d'imposition dans le cadre de la donation de titres de sociétés à l'impôt sur le revenu (IR) (CGI art 151 nonies), suivant le même principe que l'exonération CGI art 41, mais pour les titres de sociétés à l'IR.
Là encore, de nombreuses conditions sont à remplir pour bénéficier de l'application de ces régimes de report. Le formalisme, concernant les obligations de suivi, à transmettre chaque année à l'administration fiscale, doit être scrupuleusement respecté.
Au niveau des droits de mutation :
Les droits de mutation sont basés sur la valeur de l'ensemble des biens cédés selon un barème progressif.
Cependant, des abattements sur la valeur sont possibles et cumulables. Des économies substantielles peuvent être réalisées si la transmission est bien organisée.
Panorama des abattements disponibles :
L'abattement en ligne directe (CGI art 779) :
En 2013, chaque parent peut donner à chaque enfant 100 000€ en exonération totale de droits.
En cas de donations antérieures, le calcul des droits en cas de nouvelles donations ou successions est effectué en tenant compte de la valeur des biens qui ont fait l'objet d'une donation antérieure.
Toutefois, seules sont rapportées les donations passées depuis moins de quinze ans (ce délai était de 10 ans avant le 17 août 2012).
Cela signifie qu'à l'heure actuelle, vous pouvez donner par parent, à chacun de vos enfants 100 000 euros en exonération totale de droits de mutation, et cela tous les 15 ans.
L'abattement du pacte Dutreil (CGI art 787b / 787c) :
Un abattement sur 75% de la valeur de l'entreprise ou des titres de société transmis est possible.
De nombreuses de conditions de forme sont à respecter scrupuleusement, et il serait trop long de les expliciter ici. Nous pouvons cependant citer l'obligation de conservation des biens transmis pendant 4 ans et la poursuite de l'exploitation pendant 3 ans.
L'abattement sur la valeur du fond lors de la donation à un salarié (CGI art 790a) :
Un abattement de 300 000€ sur la valeur du fonds agricole ou la valeur des titres représentative du fonds est possible lorsque la donation est faite au profit de salariés en CDI depuis au moins 2 ans (il peut très bien s'agir de vos enfants).
L'abattement sur la valeur des biens ruraux donnés en bail à long terme
Le mécanisme est le suivant : lorsqu'un bien rural : terre, plantation, bâtiment agricole, est donné à bail rural d'une durée d'au moins 18 ans à un exploitant, la donation ou la succession portant sur ce bien est partiellement exonérée de droits.
L'exonération est de 75 % de la valeur jusqu'à 101 897 euros ; de 50 % au-delà. La limite de 101 897 euros n'est pas une limite globale. Elle s'apprécie au niveau de chaque part héréditaire (en cas de succession) ou de chaque donateur et donataire (en cas de donation).
Les bénéficiaires de la donation doivent conserver les biens pendant 5 ans.
Le bail doit avoir plus de 2 ans d'existence si la donation intervient avec un membre de la famille.
La réduction de la valeur des biens par la donation de la seule nue-propriété
Le démembrement consiste à scinder l'usufruit et la nue-propriété d'un bien.
Le donateur conserve l'usufruit, c'est-à-dire les revenus et la jouissance d'un bien.
C'est un moyen efficace de réduire les droits, puisque l'assiette est constituée, en règle générale par la valeur de la nue-propriété transmise, et non la valeur totale du bien.
La valeur de la nue-propriété augmente avec l'âge du donateur.
De plus, lors du décès de l'usufruitier, cet usufruit entre dans le patrimoine du nu propriétaire en franchise de droits.
Informations : Cabinet expert comptable Ballatore et Chabert à Brignoles (VAR)